" Nous ne sommes ni des Européens, ni des Indiens

mais appartenons à une espèce située entre les indigènes et les Espagnols."

– Simón Bolívar, El Libertador

PORTRAIT

Plantée de travers dessus l'Amérique du Sud, tel un morrión (1) sur la tête d'un jeune conquistador effronté à moitié soûl, la Colombie couronne son hémisphère dont elle semble surveiller de près les intérêts. Bénéficiant d'une situation géographique tout à son avantage, elle est sise au point de fusion de l'isthme de Panamá au nord du continent austral. C'est le seul pays sud-américain qui touche aux deux océans, soit l'Atlantique au nord-est par la mer des Caraïbes, et le Pacifique au sud-ouest. L'équateur, le cercle de rotation de la terre, traverse son territoire en Amazonie.

(1) morrión : casque de guerre espagnol en métal et de forme arrondie avec une bordure en retroussis, en usage dans les année 1500.

La géographie

La Colombie – dont les emblèmes nationaux sont le condor, l’orchidée Catleya trianae et le palmier de Quindío – présente une superficie de 1 141 748 km2. Deux fois plus étendu que celui de la France, son territoire accueille la moitié de la population de cette dernière, soit environ 38 millions d'habitants (0 – 14 ans, 32%, 15 – 64 ans, 64% et 65 ans et plus, 4%). Il est délimité au nord par la mer des Caraïbes (1 600 km), à l'ouest par le Panamá (266 km) et l'océan Pacifique (1 300 km), à l'est par le Venezuela (2 219 km) et le Brésil (1 645 km) et au sud, par le Pérou (1 626 km) et l'Équateur (586 km). Son drapeau national est constitué de trois barres horizontales : la jaune occupe la partie supérieure et médiane de la bannière. la bleue, représentant le ciel et la mer, occupe l’autre partie médiane tandis que la rouge, prenant la moitié de l’espace de la jaune, représente le sang des héros colombiens.

Dans sa partie ouest, trois chaînes de montagnes en façonnent le paysage pour le moins sculptural, issues de la partition de la cordillère des Andes. Au sud, en sortant de l'Équateur, celle-ci se fractionne en effet en trois branches, tel le fer d'un trident, pour former la cordillère Occidentale le long du littoral pacifique, la moins haute des trois chaînes, qui culmine à 4 250 m. Ce relief continue de s'étendre jusqu'en Amérique centrale où, sectionné, il livre passage au canal de Panamá.

Petit village dans la Cordillère des Andes

En pointe médiane, la cordillère Centrale. Colonne vertébrale de la Colombie, elle domine tout le massif avec ses volcans, ses inselbergs et ses pics enneigés de plus de 5 000 m. Finalement la branche de droite, la cordillère Orientale avec ses hauts plateaux (Bogotá) qui s'aiguisent en pointe acérée jusque dans la mer des Caraïbes pour former la Sierra Nevada de Santa Marta. En guise d'ergot, l'un des plus hauts sommets de l'Amérique du Sud, le Cristóbal Colón, qui culmine à 5 800 m. Les géologues sont d'avis que la cordillère des Andes est une chaîne de montagnes jeune, ce qui expliquerait la fréquence des mouvements sismiques qui la secoue régulièrement.

Les branches des cordillères insèrent deux vallées fertiles, la Valle del Cauca et la Valle de la Magdalena, du nom des fleuves qui les baignent. Les llanos – les plaines – et la forêt amazonienne couvrent l'est du pays, alors que littoral ouest est occupé par une forêt tropicale impénétrable : la forêt primitive du Chocó. La population est concentrée sur les hauts plateaux, dans les vallées et près de la côte caraïbe alors qu'une partie significative du territoire colombien demeure encore aujourd'hui inhabité. La fameuse route transaméricaine si controversée, la Carretera Panamericana, ne le traverse pas encore complètement. Elle s'arrête à la forêt du Chocó, où des groupes écologiques manifestent régulièrement pour sauvegarder le caractère unique de cette région. Si bien qu’il est toujours impossible de rejoindre la Colombie par voie terrestre depuis l’Amérique du Nord.

D’immenses fleuves mouillent la Colombie à savoir le río Orinoco (l'Orénoque) et le río Amazonas (l'Amazone). Étant le deuxième plus grand cours d'eau au monde avec ses 6 520 km de longueur, battu de peu par le Nil-Kagera en Afrique qui coure sur 6 670 km, ce dernier ne longe la Colombie que sur 130 km, selon un traîté signé en 1930 par la Colombie, le Brésil et le Pérou, à la suite de nombreux conflits frontaliers. On trouve aussi le río Magdalena, le río Atrato, le río Cauca, le río Meta, le río Guaviare, le río Caquetá et le río Putumayo. Tous ces grands fleuves issus des cordillères et leurs nombreux affluents irriguent avantageusement la terre colombienne qui, en retour, nourrit généreusement ses habitants.

Le río Amazonas

Enfin, l'archipel San Andrés y Providencia, dans la mer des Caraïbes de même que de nombreuses îles dont celles de Malpedo et de Gorgona dans le Pacifique font aussi partie du territoire colombien.

La faune

La variété de la faune n'a d'égale que le climat et la géographie qui regroupe plaines, montagnes, fleuves et jungles. Dans la forêt amazonienne par exemple, on peut trouver dans moins de 10 hectares, 1 500 espèces de plantes florales, 450 espèces d'oiseaux, 150 sortes de papillons, 100 espèces reptiliennes, 60 amphibiens, 750 essences d'arbre et plus de 8 000 insectes différents et souvent... piqueurs. De ce fait, la Colombie est reconnue sur le plan international comme la banque génétique de l'humanité possédant aussi un très haut taux d'espèces dites endémiques parce qu'uniques et confinées à une seule région. On peut trouver en Colombie, selon l'endroit où l'on est, des lamas, des alpagas, des iguanes, des quetzals huppés, des perroquets aras et naturellement, toute la variété des animaux domestiques connus.

La forêt équatoriale pullule de jaguars, d'alligators, d'ours, de cerfs, de serpents venimeux ou constricteurs, de loups, de renards, de lièvres, de singes, de tapirs, d'ocelots, de tamanoirs, de chats sauvages et de dindons sauvages. Le pays est aussi peuplé d'une quantité impressionnante d'oiseaux terriens et aquatiques dont les pélicans, les flamants roses, les condors, les faucons, les cigognes, les perroquets, les toucans, les paons, les colibris, les oiseaux moqueurs, etc.

Un crocodile, en Amazonie

On a repéré 150 espèces aquatiques dans le río Magdalena et plus de 250 dans le río Orinoco seulement, sans compter le dauphin d'eau douce du río Amazonas.

Les deux océans rivalisent tant par la qualité que la quantité de poissons, de mammifères et de crustacés, de la baleine à bosse près de Buenaventura à tous les delphinidés. On y pêche le requin, l'espadon, le thon, la crevette,
le rouget et la raie, entre autres de même qu'une foule de petits poissons exotiques destinés aux aquariums.

La flore

Comme la Colombie peut se targuer de présenter à tour de rôle ou en même temps tous les climats de la planète, la flore en est d'une variété étonnante. On y trouve la végétation des régions désertiques, sur la côte atlantique, celle des plateaux alpins des cordillères, celle des savanes près de Bogotá et même la toundra dans les montagnes aux neiges éternelles. Mais le pays possède aussi d'épaisses forêts tropicales, vaporeuses et humides, celles du Chocó et de l'Amazonie par exemple, dont la flore est l'une des plus importantes au monde, qui déborde d'une faune souvent inquiétante.

La flore de Colombie, notamment celle de l'Amazonie est l'une des plus importantes du monde. Ici par exemple, le Victoria Regia, cet immense nénuphar qui flotte sur l'Amazone, et ainsi nommé en l'honneur de la reine Victoria d'Angleterre (1809 –- 1901).

Encore ici, la Colombie se distingue. En effet, près de 20 000 des 55 000 espèces de plantes sont dites endémiques, c’est a dire qu’elles sont autochtones ou particulières à la région. Le palmier de cire du département de Quindío, le plus grand palmier au monde, en est un exemple.

Institutions politiques et organisation administrative

La Colombie est une république unitaire décentralisée qui élit tous les quatre ans un président et chef de l'État au suffrage universel direct. Le conservateur Andrés Pastrana Arango dirige la Colombie depuis la passation des pouvoirs de 7 août 1998, alors qu’il avait été élu au deuxième tour au cours des élections du mois de juin précédent. Il avait alors battu Horacio Serpa Uribe, le successeur du libéral Ernesto Samper Pizano qui, lui, avait assumé la présidence de 1994 en 1998.

Le président exerce son pouvoir exécutif avec les ministres qu'il désigne lui-même. Quant au pouvoir législatif, il appartient au Congrès national qui se compose de deux chambres dont les membres sont aussi élus au suffrage universel direct : il s'agit du Sénat qui compte 112 membres et de la Chambre des députés qui regroupe 199 membres.

Tous les deux ans, le Congrès élit un vice-président dans le cadre d'une session conjointe. Dans l'éventualité où le président n'est plus en mesure de le faire, c'est ce dernier qui assume la charge suprême et veille par intérim au respect des institutions.

Les votes à l'élection du 22 juins 1998 se sont répartis comme suit : 6 065 342 pour le Parti conservateur d'Andrés Pastrana Arango, soit 50,45%, 5 585 627 pour le Parti libéral d’Horacio Serpa Uribe, soit 46,46%, 371 927 de votes en blanc, soit 3,09% et 107 729 de votes annulés, soit 1%.

Pour ce qui est de l'organisation judiciaire, la Cour suprême en assume le contrôle avec 24 juges élus à vie. Elle intervient dans quatre sections distinctes : le civil, le pénal, le droit du travail et le droit constitutionnel. Pour les questions d'importance majeure, les cours pénale, civile et du droit du travail se réunissent lors de sessions plénières.

Dans les régions, il y a des tribunaux de première et de seconde instances qui siègent dans les provinces et les départements. Un tribunal de paix siège dans les communes de moindre importance.

Au niveau administratif et selon la Constitution renouvelée de 1991, la Colombie est divisée en 32 départements, avec chacun sa propre capitale, sous l'autorité d'un gouverneur : ce sont les départements d’Amazonas, d’Antioquia, d’Arauca, d’Atlántico, de Bolívar, de Boyacá, de Caldas, de Caquetá, de Casanare, de Cauca, de Valle de Cauca, de Cesar, du Chocó, de Córdova, du Cundinamarca, de Guainía, de Guaviare, de Huila, de la Guajira, de Magdalena, de Meta, de Nariño, de Norte de Santander, de Santander, de Putumayo, de Quindío, de Risaralda, de San Andrés y Providencia, de Sucre, de Tolima, de Vaupés et de Vichada. Se rajoutent le District de la Capitale, Santafé de Bogotá, et quatre Cités métropolitaines (Santiago de Cali, Medellín, Baranquilla et Bucaramanga) en plus de cinq divisions administratives appelées Commissarías, quatre Intendencias ou intendances et même un district spécial, celui de Cartagena.

Santafé de Bogotá, dans le Cundinamarca

Sur le plan international, la Colombie est membre du Mouvement des pays non-alignés qui regroupe aujourd'hui 113 membres. Mis sur pied il y a quelque 40 ans à Bandung en Indonésie par une trentaine de pays afro-asiatiques, le MNA s'assure un consensus politique en organisant des réunions trisannuelles des chefs des États participants, dans le but de relever leur standard de vie commun et d'offrir une base de discussions solides avec les autres pays du monde. En 1995 à Cartagena, la Colombie a été élue à la présidence du Mouvement jusqu'en 1998. Il s'est agi pour ses partenaires de reconnaître et d'appuyer sa participation énergique, au cours des années précédentes, au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, entre autres.

Membre aussi depuis 1968 de l'ALAC (Association latino-américaine de libre-échange) qui favorise le développement du commerce intra-zonal entre les pays signataires dont l'Argentine, le Brésil, le Chili, le Mexique, le Paraguay, le Pérou, l'Uruguay, la Bolivie, l'Équateur et le Venezuela, la Colombie a été l'un des responsables de la création du Pacte Andin. Ce traité permet aux pays impliqués d'entreprendre des initiatives économiques régionales et de signer des accords de portée partielle sans la participation des autres pays membres. Cette entente a donné naissance en 1991 au Mercosur, le Marché commun du Sud de l'Amérique. Il n'est pas exclu que le Mercosur signe des accords avec l'ALENA (l'Accord de
libre-échange nord-américain) à plus ou moins brève échéance, le Canada ayant déjà conclu un accord similaire avec le Chili.

Le portrait économique

Quelque 40% des Colombiens vivent encore sous le seuil de la pauvreté. Le produit intérieur brut a chuté récemment de 5,8% à 3,2%. Le chômage atteignait 14,5% à la fin de 1998, alors que l’inflation frisait les 20%. La déficit fiscal se chiffre maintenant à 3,8 milliards $US et seul les investissements étranger sont à la hausse, atteignant un accroissement spectaculaire de 40% au cours des dernières années pour se chiffrer à quelque 4 milliards $US.

Les richesses naturelles

Outre l'or et les émeraudes, la Colombie possède d'importants gisements de bauxite, de potasse, de charbon (gisements de Cerrejon), de nickel et de cuivre. Le pays est aussi producteur de pétrole dont les gisements des plaines côtières de la mer des Caraïbes produisent plus de 500 000 barils par jour.

Le tourisme pourrait jouer une place plus importante dans l'économie de la Colombie. Ici, la plage principale de San Andrés.

La production agricole est aussi importante et fournit du travail à plus de 30% de la population active. Alors que la production de maïs et de riz répond à la demande locale, on exporte la banane, le coton, le cacao, le tabac, le café et le sucre. Pour ce qui est de fleurs, le pays a atteint récemment le deuxième rang mondial et la flore colombienne se retrouve maintenant sur tous les marchés internationaux. On exporte aussi des crustacés, mais la pêche reste encore un domaine sous-exploité, alors que l'on pourrait facilement doubler la production du bétail. Plus récemment, la Colombie a trouvé des débouchés lucratifs sur les marchés internationaux pour son artisanat et ses produits dits d'industrie légère.

Cependant, dû à sa mauvaise réputation, la Colombie accuse beaucoup de pertes sur le plan touristique. L'infrastructure y est pourtant non seulement adéquate à tous les niveaux mais dépasse souvent les normes internationales. Les sites touristiques en Colombie sont étonnants de beauté et de diversité et quelques-uns pourraient facilement et sans contredit revendiquer le titre de huitième merveille du monde. Citons par exemple, la cathédrale de sel de Zipaquirá près de Santafé de Bogotá et les vestiges de San Agustín et de Tierradentro entre autres.

Les émeraudes

La Colombie est le premier producteur d'émeraudes au monde et fournit près de 80% de la production mondiale. Le marché des émeraudes (esmeraldas) est sous le contrôle du gouvernement par l'entremise de deux compagnies minières, la Techminas et la Coexminas. On peut cependant se procurer ces pierres précieuses aquamarines à bas prix chez des revendeurs de rue, à Bogotá notamment. Pourvu que l'on s'y connaisse bien sûr, car il est facile de se faire duper.

Les revendeurs de rue (esmeralderos) de l'Avenida Jiménez, à Bogotá

À Muzo par exemple, une ville réputée très violente et située dans une zone où l'on ne pénètre qu'avec un laissez-passer, on peut trouver des émeraudes à prix ridicule. On les achète directement des hommes, des femmes et des enfants qui fouillent sans relâche les débris d'une mine à ciel ouvert, comme des vautours s'arrachant les restes d'une carcasse éventrée encore fumante.

L'actuel propriétaire de cette mine, lui-même ancien mineur et fouilleur de débris, oblige ses bulldozers à jeter le déchet miniers, après en avoir filtré le contenu, vers des ruisseaux où pullulent les chercheurs indépendants. Son geste permet à toute une population – de 10 000 à 15 000 personnes –, de récupérer encore quelques pierres qu'ils peuvent vendre à des comptoirs spécialisés. Le déchet contient encore près de 30% de toute la récolte de pierres précieuses. De petite taille, ces émeraudes coûteraient trop cher à recueillir avec les moyens techniques habituels.

Vivant dans des baraquements de planches, ces aventuriers sédentaires dépensent en général tout ce qu'ils gagnent du commerce des pierres dans les bars et les bordels environnants qui foisonnent. On peut s'imaginer assez facilement l'atmosphère particulièrement "pétée" de cette ville irréelle où les fréquents accrochages entre individus ne dérangent plus personne sauf ceux qui sont assez près de l'échauffourée pour miser leur gain de la journée sur l'un des combattants.

D'autres vivent dans des tentes. Ceux-là arrivent de partout en provenance de tous les milieux. Ce sont généralement des familles en vacances qui viennent grossir les rangs des chercheurs pour quelques semaines, à la recherche de la grosse pierre qui les rendra éventuellement riches. Tout le monde ne fouille pas à la même place et le tambre (le déchet de la mine) réserve un emplacement à ses privilégies : les policiers et les infirmes. Une ligne imaginaire sépare ce secteur des autres, gardée en permanence par des vigiles armées. La ligne est peut-être imaginaire mais les vigiles, eux, ne le sont pas. Ils peuvent tirer sans avertir sur ceux qui s'aventurent à empiéter sur un lieu réservé.

L'or

La Colombie, neuvième au monde, fait partie des principaux pays qui produisent 20% de l'or mondial. Ce sont des compagnies nationales qui exploitent les mines ou les filons, mais des compagnies étrangères louent aussi des concessions. On dénote entres autres, la Frontino Gold Mines ltd., la Consolidated Golf Fields co., l'Anglo-Colombian Development co., la South American Gold and Platinium co. et l'international Mining co.

Sur certains fleuves et rivières cependant, sur le río Guelmambi, le río Pimbi, le río Guapípi et le río Ragui entre autres, dont les embouchures donnent sur le Pacifiques, des orpailleurs individuels se sont regroupés dans des villages, Las Penas, Los Barzos, El Venero, et perpétuent la quête de pépites d'or à la main, en filtrant l'eau et la boue à la batée, et en récoltant tout ce qui brille. Mais l'or ainsi recueilli est acheté à un prix dérisoire par les intermédiaires. Il ne suffit pas à rentabiliser une journée de travail et les orpailleurs à la petite semaine doivent aussi faire de l'agriculture pour subsister.

Le café

L'Amérique latine produit encore aujourd'hui plus de la moitié du café consommé à l'échelle mondiale. Cultivé sur un million d'hectares, le café colombien procure du travail à plus de 400 000 personnes. Comme le raisin, le café est une importation et les premiers caféiers, originaires d'Afrique, ne font leur apparition en Amérique que vers les années 1720 pour produire de petits fruits rouges, les graines Arabica. L'officier de marine français Gabriel Mathieu de Clieu aurait en effet planté le premier arbre à café au feuillage d'un vert brillant en Martinique dès cette époque. Plus tard, vers 1730, les jésuites l'auraient implanté en Colombie.

Trois fois l'an, le caféier entre en floraison. Il produit alors de petites fleurs blanches aussi odoriférantes que le jasmin. Quelque deux mois plus tard, les fleurs font place à des petites baies vertes qui prennent, en grossissant, une couleur rougeâtre puis carrément rouge sombre au bout de six à sept mois. Alors, se produit un phénomène assez rare puisque de nouvelles fleurs font leur apparition de sorte que l'arbre est en floraison en même temps qu'il est couvert de baies.

Pour obtenir le meilleur choix de grains, il faut cueillir les baies à la main, une à une, au moment où elles rougissent. L'enveloppe de la baie recouvre une couche de pulpe qui, à son tour, recouvre deux graines de café. Un certain nombre de baies sont dites macho (nous sommes en Colombie) parce qu'elles ne contiennent qu'un grain. Les Colombiens prétendent que ce grain produit le meilleur café au monde.

Par la suite, on lave les baies mûres et on les passe dans une machine à décortiquer qui les débarrasse de leur peau et de leur pulpe. Pour plus de précaution, on les fait ensuite tremper de façon à ce que la fermentation fasse dissoudre le reste de la pulpe. Les grains recueillis sont ensuite soumis à un second lavage avant de sécher dans des machines pendant une journée. Certains producteurs préfèrent encore l'ancienne méthode de séchage naturel. Ils placent ainsi les grains sur des dalles de béton exposées au soleil. Ce procédé est plus long et demande de quatre à huit jours.

À la fin du séchage, on récolte des grains d'un beau vert tendre que l'on doit "brûler" avant d'en faire un café. En général, les grandes entreprises torréfient leur café au moment de le mettre en marché, mais on peut se procurer des grains de café frais torréfiés dans des boutiques spécialisées. Pour ce qui est des petits planteurs colombiens, ils ne jurent évidemment que par le café qu'ils brûlent eux-mêmes. Et c'est ce qu'ils conseillent. Parce qu'on peut facilement faire sa propre torréfaction à la maison. Il suffit de placer quelques grains de café vert dans un poêlon en fonte chauffé à feu doux. Le processus se fait lentement. Il faut s'assurer que les grains brunissent uniformément pendant quelque 20 minutes, le temps exact de torréfaction étant matière de goût.

Le café préparé avec les grains encore chauds de la torréfaction est un délice, surtout quand on a pris soin d'écraser les grains en poudre au mortier en bois, ce qui ajoute au goût. Allez savoir pourquoi. Selon la meilleure recette au niveau des proportions, il faut une cuillerée à soupe de grains de café moulu pour confectionner une petite tasse de café à laquelle on a dilué une cuillerée de sucre. Ceux qui ont l'occasion de goûter à un café concocté selon cette recette avec des grains machos frais torréfiés affirment sans ambages qu'ils viennent de boire le premier vrai café de leur vie. Et le meilleur, il va sans dire.

Une finca (petite ferme) de café, près d'Armenia, Quindío

On boit beaucoup de café en Colombie, et tout est prétexte à déguster un tinto, un café noir. Paradoxe s'il en est un, beaucoup de Colombiens affirment qu’on n’y boit que du mauvais café, la meilleure qualité étant réservée à l'exportation. En fait, le meilleur café est acheté à 95% de sa production par la bourse de New York, aux États-Unis, pays qui ne produit même pas de café. Ce dernier le revend à plus d'une cinquantaine de pays consommateurs et c'est à New York qu'on en fixe les prix de vente internationale. Mais on peut parfaitement boire de bons cafés en Colombie, dans les grands hôtels par exemple, dans les restaurants où l’on sert l’expresso, dans les boutiques d’importation que l’on retrouve dans la majorité des grandes villes et dans les fincas (fermes) de café des départements de Calda, de Risaralda et de Quindio entre autres.

Le vin

La Colombie n'est pas un grand producteur de vin ni de... grands vins. En fait, c'est le plus petit des pays producteurs d'Amérique et la réputation de son vin ne dépasse pas ses frontières. S'agit-il du climat peu propice à la culture du fruit capricieux ou, plus simplement, du manque d'intérêt des investisseurs, sachant que la Colombie bénéficie d'un climat très diversifié? Son voisin, le Chili, fabrique pourtant d'excellents vins, et les spécialistes s'entendent pour affirmer qu'ils sont tous sous-évalués. Pour ce qui est de la Colombie, les vignes produisent du raisin plusieurs fois par année bouleversant ainsi le cycle des vendanges. On y élabore entre autres des Manzanillas, des vins de type Porto et, depuis quelques années déjà, un certain nombre de vins de table. Beaucoup de restaurants offrent une liste de vin d'importation assez complète pour satisfaire tous les goûts à prix raisonnable, notamment dans les grandes villes et les sites touristiques. Certains restaurants permettent même aux client d'apporter leur vin, prélevant en retour une taxe de bouchon.

Le peuple colombien

Maelström de couleurs crues, issues de la palette du plus fou des Fauves, amalgame d'effluves capiteux qui font tourner la tête, démence de polyphonie tonitruante et angoissante, la Colombie n'a pas fini de piquer la curiosité. Avec ses cordillères, ses vallées, ses puissants fleuves, ses multiples climats et ses reliefs déroutants, elle a forgé au fer rouge le caractère unique de sa population. Soumis depuis toujours à la servitude de son relief rébarbatif et ce, dès la venue des premiers migrants indiens en passant par les conquistadores espagnols et jusqu'à aujourd'hui, les Colombiens ont dû lutter avec hargne pour maîtriser leur territoire. De là à suggérer la violence comme signe le plus distinctif chez eux, il n'y a qu'un pas souvent aisément franchi. Pourtant, la sévérité d'une contrée ne devrait-elle pas créer chez les peuples qui l'habitent un besoin de solidarité incompatible avec l'agressivité dont sont taxés les Colombiens? Cette question demeure pour l'instant sans réponse, alors que leur fébrilité et leur exubérance sont toujours à fleur de peau. Il est indéniable qu'ils soient passionnés, dramatiques, imaginatifs, créateurs, débrouillards et même... roublards, ce qui n'est pas sans engendrer son lot de contradictions. Épicurien dans l'âme, la culture et les arts – la musique entre autres – tiennent une place plus importante chez le Colombien que chez d'autres peuples dits plus "civilisées".

Medellín, une ville mal famée et pourtant attachante.

Quatrième plus grand pays d'Amérique du Sud, la Colombie y est cependant le deuxième pays le plus populeux après le Brésil. Et, c'est aussi l'un des plus métissés au monde. La Colombie compte 50 à 55% de métis (Indiens et Blanc), 20 à 25% de mulâtres (Noirs et Blancs), 20% de Blancs, 3% de Noirs, 1% de Sambos (Noirs et Indiens) et environ 1 à 2% d'Indiens, ces derniers divisés en une cinquantaine de groupuscules réunis en une douzaine de cultures : tairona, sinú, chibcha, quimbayá, tolima, calima, tierradentro, cauca, guane, san agustín, nariño et tumaco. On y trouve aussi de nombreuses ethnies issues d'une plus récente immigration, notamment des Italiens, des Allemands, des Juifs, des Turcs, des Libanais, des Arabes, des Asiatiques entre autres, toutes d'un apport certain à la culture.

Des Guambianos, au marché de Silvia.

"L'Amérique du Sud est une abstraction" disait Henry Kissinger, ancien secrétaire d'État américain. Sa réflexion s'applique plus particulièrement à la Colombie, pays de contradictions par excellence. L’un des premiers producteur de café au monde, on y boit que du mauvais café, selon les Colombiens eux-mêmes. Pays d’extrême violence, on y rencontre pourtant une majorité de gens d’une extrême gentillesse. Pays chaud puisque situé de part et d’autre de l’équateur, on y gèle souvent puisque 70% de la population vivent dans les hauteurs des Andes, la capitale Santafé de Bogotá pouvant même enregistrer 4 oC au cours de l’invierno, la saison des pluies, alors que les vêtements d’hiver – cache-col et gants – ne sont pas considérés comme une manifestation d’élégance ou de coquetterie. Véritable Babylone de races et de couleurs, les Colombiens ne sont pas racistes pour autant. On prétend d'ailleurs, non sans une pointe d'ironie, que, s'il y a de nombreux conflits de personnalités, il n'y a jamais de races. Par contre, la ségrégation sociale est omniprésente sans égards à la couleur. L'esclavage a fait son apparition au cours des premières années de la colonisation, avec Cartagena comme plaque tournante où on y vendait autant les Indiens que les Noirs. Plus de 100 millions de Noirs ont fait les frais de ce monstrueux commerce aux Amériques dont moins d'un tiers a survécu au transport. Ils provenaient pour la plupart de razzias effectuées en Angola, au Soudan, en Guinée et au Congo. À la suite de révoltes – les premières tentatives de libération en Amérique du Sud sont le fait d'esclaves noirs soutenus par les Indiens –, l'esclavage est finalement aboli en Colombie en 1851 par le président José Hilario López. Des groupes de Noirs s'installent sur la côte caraïbe, dans le Magdalena, dans le Cauca et surtout dans le Chocó et le long du littoral du Pacifique, qui est encore aujourd'hui peuplé en majorité par leurs descendants.

De langue espagnole et de religion catholique, les Colombiens ont perdu quelque peu de leur ferveur religieuse au cours des dernières années. Dans les grands centres du moins. Dans les plus petites communautés, la religion est toujours très présente – plus ostentatoire qu'intérieure dira-t-on –, et se réclame presque du fétichisme. Les grandes fêtes religieuses comme Noël ou Pâques sont encore célébrées avec beaucoup d'éclat, et les églises se remplissent à la moindre cérémonie religieuse comme les baptêmes, les mariages ou la première communion. De plus, de nombreuses sectes ont vu le jour récemment, en concurrence directe avec l'Église catholique colombienne, la plus conservatrice de toute l'Amérique du Sud.

D'autre part, la famille continue à jouer un rôle de premier plan en Colombie même s'il s'agit d'une arme à double tranchant. En effet, protectrice sans restriction de tous ses membres, elle réclame en retour que chacun fasse sa part pour y subvenir. Ce qui taxe d'autant le développement individuel puisque cette exigence n'a aucune limite ni chronologique ni pécuniaire, sinon celle des besoins exprimés par le "clan" qui passent avant ceux de chacun des individus. L'exil ou l'émigration ne font pas obstacle à cette situation. Et effet, les Colombiens sont toujours tenus à fournir gîte et nourriture à chacun des membres de la famille en visite dans le pays d'adoption tout en étant tenu moralement d'expédier au pays une partie de leurs gains extérieurs pour le bénéfice de tous.

Le choc culturel

Si l'on y considère le choc culturel comme un miroir de notre propre identité, on peut déduire que les pays qui ressemblent le plus aux nôtres ne réussissent pas toujours à attirer notre attention puisqu'on s'y reconnaît facilement. En ce sens, la Colombie ne présente pas de différences majeures (sauf la langue bien sûr) dans les grands centres ou dans les sites ou destinations touristiques, envahis comme partout ailleurs par les téléphones cellulaires, la frénésie inutile, l'uniformité et l'internationalisme, ici l'apanage d'une nouvelle génération bien nantie, branchée sur l'antenne parabolique, l'ordinateur et le réseau Internet. Qui pourrait l'en blâmer? Cela transparaît dans son comportement, dans sa mode vestimentaire, dans ses loisirs, dans la gastronomie et dans les arts en général de même que dans la façon d'aborder et de recevoir l'étranger.

Il faut apprendre à sentir les parfums inconnus qui émanent de partout et qui "agressent" le nez. Ici, une rue de marché à Leticia, en Amazonie.

Pour un dépaysement à la colombienne, il faut apprendre à regarder, à sentir et à apprécier ces parfums inconnus qui émanent de partout et qui "agressent" le nez, surtout après la pluie. Il faut voir le déferlement des couleurs qui hypnotisent, qui enivrent. Il faut écouter la cacophonie des chansons populaires qui rivalisent de décibels avec les conversations dans une langue qui sonnent parfois comme une litanie et d'autres fois comme une longue plainte, jamais monocorde, toujours harmonique, et racontant le passé tumultueux, le présent difficile et l'avenir incertain dans une même envolée lyrique empreinte de tous les espoirs.

La violence

La Colombie jouit (sic) d'une réputation peu enviable à travers le monde et régulièrement on peut lire ou voir des reportages sur la violence qui y sévit. "La Colombie est un pays violent" semble être le cliché le mieux entretenu dans les milieux touristiques. Peut-être cette situation est-elle à l'avantage des autres destinations de vacances qui y perdraient au change si cette réputation s'avérait fausse. Sans verser dans l'obséquiosité, admettons qu'on doive y regarder à deux fois avant de porter un jugement global. En effet, une analyse plus sérieuse démontrerait sans aucun doute qu'une infime partie de la population seulement se livre au crime violent. Comme n'importe où ailleurs, d'ailleurs. Mais elle est la seule responsable de cette réputation "diabolique" qui rejaillit sur l'ensemble des Colombiens et qui les stigmatise sur le plan national et international. Il faut noter que les méfaits qu'on reproche à la Colombie sont de type hot, c'est-à-dire des crimes à la mode qui constituent une véritable manne pour les médias d'information, et dont les gens aiment à entendre parler : la drogue, la guérilla, le machisme.

En fait, la violence sévit d'une façon endémique dans certaines régions bien spécifiques en Colombie. Au moins six groupements important tirent vers eux la couverture du pouvoir tout en dominant certaines régions. Il s'agit des deux partis politiques les plus importants, les libéraux et les conservateurs, puis suivent les militaires, les paramilitaires, les guérilleros et la mafia.

Révolutionnaires qu'ils étaient au cours des 40 dernières années et formés au maniement des armes, la majorité des groupes de guérilleros ont eu pendant quelques années pignon sur rue dans l'arène politique. En effet, peu après l'attaque du palais de Justice de Bogotá par les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) en 1985, Belisario Bétancur participe à la création du groupe Contadora, destiné à mettre fin aux conflits en Amérique latine. Le groupe Contadora réussit à formuler des principes destinés à ramener une paix sociale entre les différente factions politiques, notamment en Colombie. Pendant les années qui suivent, la plupart des groupes de guérilleros délaissent la montagne pour se présenter dans l'arène politique officielle. Ils jouent le rôle de véritable opposition en dénonçant l'insécurité matérielle, les inégalités sociales et la pauvreté engendrée par les privilèges dont jouissent encore les grands propriétaires terriens.

Mais en 1992, la situation économique se détériore encore et la guérilla se manifeste de nouveau. Mais, certains groupes de guérilleros entretiennent des relations plus que douteuses avec les trafiquants de drogue qu'ils protègent en échange d'argent pour le financement des armes. La puissance financière des narcotraficants devient telle qu’elle peut influencer les élections. Ernesto Samper Pizano a d’ailleurs fait l’objet d’accusation de collusion avec le cartel de Cali lors des élections qui l’avaient porté au pouvoir en 1994. Pour leur part, les États-Unis l’avait banni de leur territoire, à la suite de cette accusation. Il faut spécifier que l'entrée des devises étrangères suscitée par le marché des drogues constitue un fameux dilemme pour un pays en crise, surtout quand le blanchiment d'argent est directement responsable du boum dans la construction à travers la Colombie L'ancien caïd du cartel de Medellín, Don Pablo Escobar, n'avait-il pas offert au gouvernement de payer la dette nationale extérieure en échange d'une amnistie? Il a lui-même déjà déboursé les coûts de construction des maisons de tout un quartier destinées aux plus démunis à Medellín.

D’autre part, des groupes d'extrême droite (paramilitaires) ont fait leur apparition sous le nom évocateur de vigilantissimo (vigile extrême) En juillet 1997, ces escadrons de la mort se sont livrés à un véritable massacre qui a fait 25 victimes dans la région de Mapiripan à quelque 210 km au sud-est de la capitale Bogotá. En 1998, peu avant les élections, ils ont tués 25 otages dans la région de Barancabermeja, dans le département de Santander. Ils accusaient les villageois de soutenir la guérilla guévariste de l’Armée de libération nationale (ELN). Ils n’ont pas non plus hésité à passer à l’attaque en plusieurs autres occasions parce que, prétendent-ils, les militaires refusent de le faire.

Les responsables gouvernementaux choisissent-ils de tenir la Colombie dans la violence que l'on connaît? La réponse à cette question n'est pas si simple et comporte en soi des zones de nuances qu'il ne faudrait pas sous-estimer. En effet, si la Colombie se veut une démocratie pluraliste, la réalité est tout autre. À la fin des années 50, les conservateurs et les libéraux – les deux principaux partis politiques de Colombie –, ont signé un pacte voulant qu'ils se partagent le pouvoir à tour de rôle, de façon à éviter la guerre civile. Tous les partis se sont alors livrés au clientélisme systématique, ce qui a eu pour effet de créer de nombreuses dettes. Par ailleurs, ce bipartisme, qui a prévalu jusqu’à la refonte de la constitution en 1991, ne prédisposait certes pas à la prise de décision pouvant porter atteinte à ceux qui ont favorisé cette entente de partage, c'est-à-dire les grandes familles, les grands propriétaires terriens et les industriels, entre autres. Le népotisme a donc paralysé tout l'appareil gouvernemental pendant longtemps, alors que le travail était distribué non pas par compétence mais par relation. De nombreux postes coûteux n’ont été créés qu'à titre de récompense pour services rendus, puisant inexorablement les fonds d'un tel régime à même ceux prévus pour les programmes sociaux alors que l'effet domino s'installe même dans les grandes entreprises. D'autre part, on prétend toujours en Colombie que le pays est la propriété de 24 dynasties qui la gouvernent à tour de rôle depuis plus de 100 ans, ces dernières étant issues des familles de conquistadores devenu colons et qui se sont implantés sur des domaines terriens dès le début de la colonisation. Dans ce contexte, les élections n’ont souvent suscité qu'indifférence chez une population largement désabusée.

On comprendra facilement que, dans ces conditions, le chacun pour-soi – et pour ses proches – devienne une nécessité pour une bonne partie de la population, avec la survie comme unique perspective. L'anarchie hargneuse qui en découle s'impose comme loi, avec ce que cela comporte : la violence acceptée comme mode de vie. Dès lors, le machisme dicte les relations hommes femmes. En outre, un sens de l'honneur, de bravoure et de virilité sous-tend toutes relations ou discussions. Puis, le règlement de compte s'installe comme tribunal au moindre désaccord. Et comble d'ironie, la vie en Colombie y est d'une intensité à nulle autre pareille, comme en témoigne la majorité des Colombiens qui ne sont pas sans tirer une certaine fierté de cette situation. Cependant une vague de changement déferle présentement en Colombie. Lors des dernières élections de juin 1998, la population a clairement laissé entendre aux dix candidats à la présidence son ras-le-bol de la violence et l’impunité des crimes. Le 19 juin en effet, une manifestation monstre a été organisée sur la Plaza Bolívar de la capitale colombienne, qui a été accompagnée d’une manifestation symbolique dans les autres grandes villes, une démonstration de la volonté ferme du peuple qui a paralysé le pays tout entier pendant plus d’une demi-heure.

La Plaza Bolívar de Bogotá. Au fond le Palais de Justice attaqué par les guérilleros en 1985.

Le machisme

Le machisme est-il un crime? Non, bien sûr! Mais Alors? Alors, c'est une attitude contraire à la pensée politicly correct de l'Amérique du Nord, leader des grands courants de la pensée universelle. De nos jours, les machos sont cloués au pilori – et partant, la Colombie aussi – sans autres formes de procès et surtout, sans égard pour la culture de ce pays.

Depuis quelques années pourtant, on peut sentir un vent de changement. Une brise encore bien faible pour l'instant. En effet, les femmes ont pénétré graduellement le marché du travail pour faire concurrence aux hommes sur le plan économique et, conséquemment, l'on remarque de plus en plus une forme d'indépendance sociale chez ces dernières. Elles ont leur place dans des postes de ministre et de haut fonctionnaire au sein du gouvernement et elles sont de plus en plus mêlées aux décisions qui touchent l'ensemble de la société et du rôle social de la femme en particulier. Ce qui est la moindre des choses.

La coca

La feuille de coca est une petite feuille verte et pointue qu'on peut facilement confondre avec une feuille de thé. Elle pousse sur des arbustes pouvant atteindre 3 m de hauteur. Les Indiens de Colombie transforme la feuille de coca en mambe, un composé de cendre et de feuille de coca dont ils remplissent leur poporó, une courge vidée (calebasse) en forme de poire. Au besoin, ils y trempent une longue et mince paille en bois qu'ils lèchent pour en absorber le contenu qui leur confère énergie et audace. Ils portent le poporó dans leur guambia – une sorte de sac en bandoulière – quand ils doivent quitter leur village pour un voyage de plusieurs jours. Pour aller à la chasse par exemple. Pour traverser les montagnes et se rendre au marché d'un village éloigné où ils peuvent vendre leurs fruits et légumes et leurs produits d'artisanats. Ainsi utilisée le mambe constitue un aliment d'économie qui soustrait à la fatigue, à la faim et à la soif. Lors de déplacements, les Indiens peuvent donc passer des journées entières sans manger ni dormir, ce qui écourte le temps de leur propre solitude et celui qui les oblige à laisser leur famille sans protection.

D'autre part, les naomas , les prêtres-sorciers, utilisent aussi la feuille de coca dans les cérémonies religieuses. Ils consomment aussi d'autres substances ou boissons hallucinogènes fabriquées notamment à partir du cactus San Pedro qui contient de la mescaline. "C'est coultoural" me dit-on en français, avec la prononciation franco-espagnole caractéristique des Latino-américains. Et si tous les gouvernements du monde hésitent aujourd'hui à s'attaquer au tabagisme et le rendre illégal, une coutume qui ne remonte pourtant qu'à quelques années, le gouvernement colombien serait mal venu, on le comprendra, de légiférer contre l'utilisation de la feuille de coca par les Indiens, une coutume qui remonte à plusieurs millénaires.

Chaque groupe d'Indiens possède sa propre recette de plante médicinale ou hallucinogène qui a pour effet d'augmenter leur concentration ou leur force physique ou les deux en même temps. Par exemple, certains Indiens de l'Amazonie consomment un puissant hallucinogène, la bufotéine, sécrétée par les glandes cutanées d'un crapaud.

 

Le mambe

La préparation du mambe varie très peu d'une région à l'autre et d'une coutume indienne à l'autre. Premièrement, il faut faire chauffer des pierres rondes d'eau douce dans le feu pendant 30 à 40 heures. Puis, on place les pierres dans un chaudron sur le feu avec de l'eau bouillante et du sucre brun jusqu'à ce que la pierre se désintègre. On retire ensuite l'eau pour ne conserver que la poudre ainsi formée que l'on verse dans le poporó.

On fait alors sécher la feuille de coca que l'on réduit aussi en poudre. Après l'avoir introduite à son tour dans le poporó, on mélange bien. Ensuite, on prend quelque feuille de coca en bouche et l'on y ajoute le mélange du poporó que l'on retire à l'aide d'une tige humide. On mâche pendant une quinzaine de minutes avant de cracher le tout.

Il faut spécifier que les Indiens n'apprécient pas le citron et la lime dont les propriétés astringentes assèchent la bouche, la salive étant nécessaire pour favoriser les effets du mambe.

La cocaïna

Au cours de la guerre du Vietnam, des G.I. américains avaient fait fortune en vendant du haschisch (disponible partout en orient) aux troupes nixonniennes qu'ils avaient joyeusement "gelées" sur place. De retour aux États-Unis et désirant continuer leur commerce prospère, ils ont trouvé plus facile de faire un pont par air ou par mer entre la Floride et la Colombie que de cultiver la marijuana dans leur pays. Ils débarquent donc dans la péninsule de la Guajira en quête de la matière première qui leur permettra de continuer à fournir leurs anciens camarades de combat et leurs nouveaux clients aux États-Unis qui, peace and love aidant, réclame de plus en plus de drogue. En effet, de retour du Vietnam, les Marines n'avaient pas tardé à refiler l'habitude de fumer un beau gros joint, un pétard, à l'ensemble de l'Amérique du nord, habitude qui s'est étendue par la suite aux pays d'Europe. D'autre part, le Mexique étant de plus en plus dans le collimateur du DEA (Drug Enforcement Agency, bureau américain de lutte antidrogue) comme premier exportateur de marijuana et de mescaline, il fallait trouver rapidement un fournisseur de remplacement.

Sur place, les nouveaux conquistadores d'Alta Guajira n'ont pas tardé à faire la découverte des bienfaits de la feuille de coca et se sont mis à sa recherche avec la même frénésie que leurs prédécesseurs pour l'or. Comme la substance avait déjà été utilisée dès les années 1900 dans leur boisson favorite, le Coca-Cola, ils savaient comment la raffiner avec des produits chimiques pour en faire un produit de consommation courante : la cocaïna. La coke!

Dès le début, les Américains ont gracieusement laissé cette technologie dans les mains de petits pégreleux colombiens pour se contenter d'en faire la distribution aux États-Unis. Les petits pégreleux se sont rapidement métamorphosés en super mafiosi internationaux en fournissant les réseaux de distribution déjà structurés aux États-Unis et à travers le monde. La suite de l'histoire est déjà amplement connue, incluant l'établissement des propres réseaux colombiens en Amérique du Nord et en Europe, la déclaration de guerre du président Bush et de ses successeurs aux narcotrafiquants ainsi que la violence qui s'y rattacha. Qui, en effet, n'a pas entendu parler de l'incarcération de Pablo Escobar, le chef du cartel de Medellín, qui avait lui même tracé les plans de sa prison et en avait défrayé les coûts de construction, y compris l'installation d'une toile anti-bombes au-dessus pour prévenir les attaques de ses ennemis par avion ? Qui n'a pas eu vent de son évasion en 1992? Quel média n'a pas rapporté en long et en large les circonstances de sa mort violente un an plus tard, en pleine rue, en plein centre de son fief d’Envigado, un quartier de Medellín?

 

La tombe de Pablo Escobar, à Medellín. On peut y lire l'inscription suivante :

"Mientras el Cielo Exita

Existrán Tus Monumentos

y Tu Nombre Sobrevivirá

como el Firmamento"

qui signifie en substance :

"Aussi longtemps que le ciel existera

il y aura des monuments

sur lesquels ton nom survivra

comme au firmament"

La fabrication de la cocaïne

Si l'Autrichien Sigmund Freud vante les qualités thérapeutiques de la cocaïne dans son livre Ueber Coca publié en 1884, c'est parce que l'Allemand Wilhelm Lossen a mélangé, dès 1844, les feuilles de coca à de l'éther et de l'essence pour en faire du chlorhydrate de cocaïne que l'on nomme aujourd'hui la coke.

Pour obtenir un kilo de cocaïne tant prisée (sic) par les consommateurs, il faut 500 kilos de feuille de coca. Premièrement, il est nécessaire d'extraire de la feuille de coca l'alcaloïde qui s'y trouve. Pour se faire, on fait tremper les feuilles dans un mélange de potasse ou de carbonate de soude et d'eau. Ensuite, on les fait macérer dans un bac de kérosène qui dissout l'alcaloïde. Quand le tout devient une boue noire, on y ajoute de l'acide sulfurique qui, agissant sur l'alcaloïde, transforme cette dernière en sulfate de cocaïne. On retire le kérosène pour le remplacer par de l'alcali qui neutralise les effets nocifs de l'acide sulfurique. On obtient ainsi une pâte-base grise qui, à son tour, est plongée dans le kérosène. Au bout d'un moment, il se forme des couches d'alcaloïde de cocaïne pur à 60%. Il faut alors laver et sécher cette pâte, puis la replonger dans l'acide sulfurique auquel on rajoute du permanganate de potassium. Ensuite, on filtre le tout. On rajoute au produit obtenu de l'hydroxyde d'ammonium et, après un autre filtrage, on obtient de la cocaïne-base. Pour en faire le produit le plus recherché des consommateurs, il faut encore dissoudre la cocaïne-base dans de l'éther et y ajouter de l'acide chlorhydrique et de l'acétone. Et voilà la cocaïne prête pour la consommation. Ce n’est cependant pas un produit que l’on trouvera de sitôt dans les comptoirs d’aliments naturels!

C'est coultural! Bon! Admettons! Mais c'est aussi illégal pour l'ensemble de la population colombienne et pour les touristes qui ne sont aucunement descendants directs de tribus indiennes d'Amérique du Sud. La possession, la vente et l'exportation sont sévèrement puni par les autorités locales et internationales. Rien n'est plus à déconseiller qu'un séjour dans une prison étrangère. Ce n'est déjà pas une sinécure dans son propre pays! Même si les Colombiens sont, en général, d'un commerce fort agréable, il ne faudrait tout de même pas s'attendre à ce qu'ils mettent des hôtels de catégorie supérieure ou de luxe à la disposition des étrangers qui lèvent le nez sur leurs lois. De plus, les vendeurs de drogues étant des gens peu recommandables dans quelque pays que se soit, leur fréquentation se fait donc aux risques et périls de chacun.

Rendu possible grâce à la "demande" des marchés internationaux et surtout celui des États-Unis, la puissance des "barons de la drogue" leur permet de lever une véritable petite armée pour assurer leur défense. Ils se sont ainsi rendu littéralement maîtres de régions entières. Selon certaines sources, la drogue représenterait près de 14% des exportations de la Colombie et un peu moins de 5% de son produit intérieur brut.

Le gouvernement Colombien a, pour sa part, entrepris une série d'actions d'envergure contre les trafiquants depuis 1989, suite à l'assassinat par le cartel de Medellín du candidat libéral aux élections de 1990 Luis Carlos Galán, en lutte ouverte contre les narcotrafiquants. Mais il demeure encore évident aujourd'hui qu'une partie du pouvoir est dans les mains de la mafia de la cocaïna qui tire un grand nombre de ficelles, œuvrant aussi maintenant dans l'héroïne et autres drogues dures. Aujourd'hui, la Colombie doit s'attaquer en priorité à la pauvreté et à la drogue mais elle ne pourra en venir à bout sans l'appui des principaux pays concernés par ce fléau.

Culture et tradition

L'art a toujours tenu une place prépondérante en Colombie que se soit dans le domaine de l'architecture, des arts plastiques, de la littérature ou de la musique. De nombreux artistes colombiens ont fait leur marque sur le plan national et international. À l'image de son peuple diversifié, l'art colombien est le reflet de ses diverses régions. Chacune d'elles ayant ses propres valeurs, il n'en demeure par moins que la Colombie présente une homogénéité assez remarquable en comparaison aux autres pays latino-américains.

L'architecture

L'Architecture colombienne du début de la colonisation est caractérisée par la pauvreté des matériaux utilisés, surtout le bois. Et ce n'est que vers la fin du XVIIe siècle que l'on commença à ériger des cathédrales et des monastères en pierres tout en gardant le bois comme élément de décoration. Du point de vue style, la Colombie perpétua longtemps un art baroque fortement influencé par le style espagnol en vogue à la fin du Moyen Âge. Elle fut détournée de la Renaissance qui triomphait au même moment parce que ses nouveaux habitants, en majorité incultes ou trop occupés à la conquête, n'en subirent aucunement l'influence.

Dans l'architecture coloniale du début, on remarque surtout l'influence de l'art mudéjare, caractérisé par ses ornements abstraits et rococos et l’absence totale de représentation d’êtres vivants par crainte de l’idolâtrie, tel que prescrit par le Coran, et du style plateresque, fortement illustré, caractérisé par la profusion d’ornements baroques. Ils règnent en maître sur les édifices laïcs ou religieux, notamment sur les toits en bois et sur la décoration des façades. Mais, la patine du temps sur un matériau sensible comme le bois et surtout les ravages du feu ont laissé peu de vestiges de ces premiers balbutiements.

Cependant, on trouve encore en Colombie quelques monastères de l'époque, notamment le monastère franciscain de Tunja, la capitale de Boyacá à l'entrée des llanos érigé en 1550. À Bogotá même, on peut admirer le monastère de la Conceptión qui témoigne lui aussi du règne de l'art mudéjare. D'autres constructions intéressantes ne manquent pas dans cette ville et beaucoup d'églises sont remarquables notamment pas la décoration intérieure qui tenait une place primordiale au XVIIe siècle

 Pour leur part, les nouveaux leaders colombiens en architecture ont su développer un style original, homogène, moderne, avec une touche bien particulière d'interprétation du baroque d'autrefois – dans les lignes épurées par exemple et dans l'utilisation du bois et du fer forgé en guise de décoration. Les condominiums (appartements), plusieurs hôtels et de nombreux édifices gouvernementaux ou privés commandés à de jeunes cabinets d'architectes en sont des exemples éloquents, notamment dans les grandes villes comme Bogotá, Medellín, Santiago de Cali et Baranquilla.

La peinture et la sculpture

Dans le domaine de la peinture, les Colombiens ont également fait preuve d'une grande créativité. Après les chefs-d'œuvre de l'époque coloniale, dont Gregorio Vásquez de Arce y Ceballos et Ricardo Acevedo Bernal furent les représentants les plus acclamés, et de l'époque impressionniste, dont Andrés de Santa María fut le précurseur, c'est surtout la peinture contemporaine qui attire l'attention.

Don Quijote de la Mancha, de Miguel de Cervantes, une sculpture dans

un parc, à l'entrée de Popayán.

Si tous les pays le moindrement ouvert sur le monde subissent en même temps les mêmes influences en ce qui a trait à l'art plastique contemporain, la Colombie ne fait nullement exception à cette règle : sa sculpture et sa peinture ont fortement été influencées par les mouvements et les écoles en vogue aux États-Unis et en Europe et même en Orient. Les artistes colombiens se sont adaptés aux tendances dites internationales. Si par ailleurs on leur reproche souvent un certain manque d'originalité alors qu'un marasme synchrone est repérable partout même à New York, à Paris, à Londres, à Berlin ou à Montréal, c'est qu'on oublie trop souvent que l'art officiel répond à des critères "académiques" bien précis et partant restrictifs. Ce carcan "art moderne" laisse en effet peu de place à l'expression personnalisée, au figuratif par exemple, un trait caractéristique du langage plastique latino-américain et particulièrement colombien. Gonzalo Ariza par exemple, avec ses toiles marquées d'une forte influence orientale (le peintre ayant étudié au Japon), nous fait découvrir avec une sensibilité peu commune la beauté de la nature colombienne à travers ses paysages andins. Dans un tout autre style, Eduardo Celis et ses tableaux hyperréalistes méritent également une mention plus qu'honorable. Qu'il suffise de nommer Alejandro Obregón, Edgar Negret, Fernando Botero, Luis Caballero et Dario Morales pour n'en citer que quelques-uns qui ont fait leur place depuis longtemps au soleil mondial. Ce qui permet évidemment d'oublier les autres peu ou pas connus, pourtant chefs de file d'un art populaire d'une originalité assez spectaculaire. En font foi les décorations d'autobus, chivas, qui sont de véritables chefs-d'œuvre, notamment dans le département d'Antioquia. Voilà les vrais artistes contemporains de la Colombie.

La littérature

En littérature, l'influence européenne s'est manifestée trop longtemps chez les écrivains latino-américain et colombiens qui se sont exprimé souvent en castillan et même en français pour se faire connaître.

Récemment, la récurrence de la littérature européenne dans l'imaginaire des écrivains colombiens a semblé moins marquée. Citons Jorge Isaacs (1837-1895) qui, dans son célèbre roman intitulé María, décrit les mœurs campagnardes de l'époque, ainsi que José Eustacio Rivera (1888-1928) qui, dans son roman La voragine (Le gouffre), évoque avec réalisme les difficiles conditions de survie de l'homme dans la forêt tropicale. C'est également avec beaucoup de réalisme que, dans Cuatro años a bordo de mi mismo (Quatre années à bord de moi-même), Eduardo Zalamea Borda nous fait partager les dures conditions de vie dans la péninsule de la Guajira. Parmi les écrivains natifs de Cartagena, citons Luis Carlos López (1881-1950), qui écrivit plusieurs recueils célèbres, et Rafaël Núñez (1825-1894), un poète romantique qui joua aussi un grand rôle dans la vie politique. Plus récemment encore, et comme toute la communauté internationale, les écrivains colombiens ont été profondément touchés par le régionalisme symbolique de Cent ans de solitude du prix Nobel Gabriel García Márquez qui nous fait découvrir au travers d'une bourgade rurale imaginaire appelée Macondo le vécu des familles villageoises. Ces dernières, mêlées malgré elles aux événements politiques qui secouent le pays, se voient entraînées dans la spirale de la brutalité, rappelant ainsi la cruelle période de la Violencia. D'autre part, le ton neurasthénique calculé de Márquez qui se dégage du roman Le général dans son labyrinthe (1989) relatant la fin de la vie de l'illustre Simón Bolívar n'est pas sans rappeler le spleen B.C.B.G. en vogue en Europe depuis quelques années. Cette influence est-elle une nouvelle vague? Est-ce l'indice d'un néo-colonialisme littéraire qui s'installe à nouveau en Colombie? Seuls, les écrivains colombiens sont en mesure de répondre à cette question.

La musique populaire

La fin de semaine colombienne est consacrée à la danse, principalement la salsa que l'on réchauffe à coup de litres d'aguardiente (une eau-de-vie de canne à sucre anisée), alors que les telenovelas, téléromans ou soap operas font relâche. L'industrie de la musique populaire est très dynamique en Colombie, comme partout ailleurs en Amérique latine. Riche et variée, cette musique puise ses sources à tous les courants et surtout dans le folklore diversifié des régions sud-américaines et caraïbes. Partout, salsa et cumbia sont omniprésentes, la cumbia jouissant pratiquement du statut de danse nationale. Elle fut apportée par les esclaves noirs d'Afrique de l'Ouest. Du côté de la salsa – une sauce concoctée avec différents éléments –, influencée par le guaguanco, la guaracha, le cha-cha-cha (Mexique) et la mambo (Cuba), il faut mentionner le plus grand des salseros originaire de Cartagena, Joe Arroyo, 14 fois vainqueur du trophée Congo au Carnaval de Barranquilla. Chacune de ses représentations attire des foules nombreuses. Pour son concert célébrant ses 25 ans de scène, 80 000 personnes avaient pratiquement démoli un parc à Bogotá.

Dès les premiers jours en Colombie et principalement sur la côte caraïbe, vous noterez cette musique vive et rythmée, accompagnée d'accordéon et à l'esprit plutôt folklorique, qu'est le vallenato. Ce genre musical, un country à la sauce colombienne, provient du nord-est du pays, de la région de la Guajira, et date du début de ce siècle. Il connut une très grande vogue dans les années soixante et soixante-dix, mais on l'entend toujours, et des chanteurs très connus, comme Diomedes Díaz, continuent d'enregistrer des succès vallenatas.

La gastronomie

La gastronomie est très diversifiée en Colombie. On y trouve en effet une variété de cuisine internationale complète incluant les restaurants chinois aux plus sophistiqués des restaurants français ou italien, en passant par les restaurants japonais, espagnols, suisses, argentins et russes entre autres. Le fast food, (la comida rapida), est omniprésente, chaque porte ou presque des centres-villes concurrençant à la colombienne les McDonald ou autres pizzerias ou rôtisserie american style qui font la livraison dans les édifices à bureaux ou à la maison.

La pénurie de réseaux aériens et routiers qui a prévalu longtemps à cause de l'escarpement du territoire a réduit beaucoup de régions à l'isolement. Cette situation a, en contrepartie, contribué à l'essor d'une cuisine régionale originale qui fait la fierté de tous les Colombiens. On trouve de tout en Colombie, un pays autosuffisant en ce qui a trait à la production agricole, à l'élevage et aux pêcheries. Dépendant de la région donc, on mange du bœuf, du porc, de l'agneau et du poulet apprêtés de toutes les façons imaginables, avec tous les légumes exotiques connus. Dans les régions côtières, on déguste tous les poissons et fruits de mer de saison. D'autre part, certains cervidés fournissent une viande exquise alors que le hocco, gros oiseau tapageur à plumage noir, se présente comme la meilleure viande de volaille d'Amérique latine. Il arrive que l'on mange du singe ou de l'iguane, surtout chez les paysans qui les considèrent comme des délices.

On trouvera partout des restaurants typiques servant une cuisine régionale, surtout le midi. C'est l'almuerzo, le repas économique du milieu du jour, alors que le desayuno, le déjeuner, se prend le matin et la cena le soir. Elle plaît ou ne plaît pas, c'est matière de goût. Il faut savoir cependant que, comme toutes les cuisines régionales du monde, elle est à base de morceaux économiques de viande ou de poisson, accompagnés de fèves et de riz, ce qui en fait une cuisine lourde. Il faut aussi savoir que les restaurants typiques de Colombie offre une autre particularité typique : la télévision. Elle joue toujours à tue-tête pour créer l'ambiance ou pour divertir les enfants. C'est désagréable et l’on ne s'y fait pas. Autre particularité agaçante, on apportera le plat principal avant même que vous n’ayez terminé l’entrée. On ne s’y fait pas non plus.

Pour ce qui est de l'assaisonnement, on concocte partout des sauces piquantes qui ne sont pas incluses dans les recettes mais servies aux tables. On évite ainsi de se faire emporter le palais par des plats trop relevés, ce qui est souvent le cas au Mexique ou dans les îles des Caraïbes par exemple.

On ne pourra pas s'empêcher de goûter à l'arepa, une galette de pâte frite faite de farine de maïs pétrit avec de l'eau et servie avec tous les plats. L'arepa ne vaut certainement pas le bon pain, rare en Colombie, mais on la retrouve sur toutes les tables latino-américaines. Pour ce qui est du plantain, le fruit du bananier de paradis, on le consomme autant cru que poché, frit, grillé, en ragoût et en potage. On en fait même des chips alors qu'on le fait frire en rondelles qui, aplaties, sont replongées de nouveau en pleine friture, ce qui les rend croquantes comme toutes croustilles devraient l'être.

La noix de coco est employée dans plusieurs plats mijotés auxquels elle confère non seulement une couleur originale mais un goût exceptionnel. En outre l'huile de coco est couramment utilisée pour la friture, comme l'huile d'arachide d'ailleurs. Mais c'est évidemment dans les postres (les desserts), surtout les crèmes glacées, que la noix du cocotier déploie toute sa splendeur et émerveille encore longtemps les papilles après dégustation. Les plus audacieux tenteront de déguster las culonas (les gros culs), de grosses fourmis sans véritable saveur propre mais goûtant la graisse dans laquelle on les fait cuire. Et le sel qui les enrobe. Comme les escargots d'ailleurs qui goûtent le beurre à l'ail dans lequel ils cuisent. Las culonas sont l’une des spécialités de la région de Bucaramanga, la capitale de la province de Santander dans les llanos.

Pour trouver les meilleurs restaurants de Colombie, il faut arpenter la Zona Rosa des villes visitées. La Zona Rosa est un quartier – parfois identifié comme tel d’autre fois non – où l'on trouve la plus grande concentration de bars, de discothèques et de restaurants. Tous les chauffeurs de taxis connaissent la Zona Rosa de leur ville et peuvent vous y conduire. On peut aussi s'informer à la réception de l'hôtel

Fêtes civiles et religieuses

Comme la Colombie est un pays essentiellement catholique où la religion joue encore un rôle de premier plan, les fêtes religieuses sont nombreuses et célébrées avec beaucoup d'ostentation. On commémore aussi de nombreux événements qui ont marqué la vie politique du pays et chaque jour férié est prétexte à la fiesta, à la salsa, à la discoteca, à la musica en général, le tout arrosé de bière, de rhum et d’aguardiente.

SOURCE : Les guides ULYSSE/COLOMBIE

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